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Les chèvres qui pâturent produisent un lait de meilleure qualité nutritionnelle et sensorielle

Le lait produit par les chèvres nourries avec de l’herbe fraîche est plus riche en composés nutritionnels (vitamines A, E, B2 et B6 et caroténoïdes) que le lait des chèvres nourries avec des fourrages conservés. Les facteurs qui déterminent la composition et la teneur en vitamines du lait de chèvre ont été encore très peu étudiés. Cette étude avait pour objectif de comparer la composition en composés vitaminiques du lait de chèvre en fonction du type de fourrage proposé, de la race des animaux et de la saison.

L’étude a été conduite dans 28 fermes commerciales conduites avec une reproduction saisonnée, sélectionnées en fonction du système d’alimentation principal des animaux durant la période de pâturage : herbe fraîche (au pâturage, en fourrage vert ou les deux), herbe humide (enrubannée ou ensilée), herbe sèche (foin de légumineuses, graminées ou les deux) ou, enfin, ensilage de maïs. La race des chèvres (Alpine vs Saanen) a également été prise en compte. Chaque ferme a fait l’objet de 2 visites (au printemps et à l’automne), comprenant un entretien sur les conditions de production du lait et une prise d’échantillon du lait stocké dans le tank. Les teneurs en vitamines (A, E, B2, B6, B9, B12)[1] et en caroténoïdes du lait ainsi que les indices de couleur ont été évalués.

Photo de Jérémie Joste (IDELE)

La nature du fourrage a un effet prépondérant

Le fourrage majoritaire dans l’alimentation des chèvres est apparu comme le principal facteur modifiant les concentrations de vitamines et de caroténoïdes et les indices de couleur du lait.

Le lait des chèvres consommant de l’herbe fraîche était plus riche en α-tocophérol (+64 %), en pyridoxal (+35 %) et en vitamine B6 totale (+31 %). L’indice b* (caractérisant la couleur jaune du lait) était également plus élevé (+12 %) que dans le lait des chèvres consommant des fourrages conservés.

Le lait des chèvres consommant de l’herbe fraîche était également plus riche en pyridoxamine, lutéine et caroténoïdes totaux que le lait des chèvres nourries avec de l’ensilage de maïs (+24, +118 et +101 %, respectivement), et plus riche en rétinol et α-tocophérol que le lait des chèvres nourries avec de l’herbe partiellement déshydratée (+45 et +55 %).

Enfin, la concentration en vitamine B2 était elle aussi plus élevée dans le lait des chèvres mangeant de l’herbe fraîche que dans le lait des chèvres nourries avec du foin ou de l’ensilage de maïs comme fourrage (+10 %). Cependant, le lait des chèvres ayant accès à de l’herbe fraîche était significativement plus pauvre en vitamine B12 que celui des chèvres nourries avec de l’ensilage de maïs (-46 %) et en γ-tocophérol (-31 %) que celui des chèvres nourries avec des fourrages conservés, quels qu’ils soient.

Un effet modéré de la race et de la saison

Les chèvres de la race Alpine ont produit du lait avec des concentrations en vitamine B2 et en folates plus élevées que les chèvres de race Saanen (respectivement +18 et +14 %). En outre, l’indice de couleur du lait, qui distingue les laits en fonction de leur teneur en pigments jaunes, était 7 % plus élevé dans le lait des chèvres de la race Alpine que dans celui des chèvres Saanen, mais le lait des chèvres Saanen était plus riche en lutéine (+46 %). Enfin, les laits étaient plus riches en vitamines B2 et B12 et en folates, mais moins riches en vitamine B6 en automne qu’au printemps (respectivement +12, +133, +15 et -13 %).

Ce travail met en évidence, en conditions d’élevage réelles, que les concentrations en vitamines et caroténoïdes du lait de chèvre et les indices de couleur varient principalement en fonction du fourrage majoritaire de l’alimentation et ensuite en fonction de la race et de la saison.

Les chèvres nourries avec de l’herbe fraîche produisent un lait légèrement plus jaune et plus riche en plusieurs vitamines (vitamines A, E, B2 et B6) et en caroténoïdes, qui présentent un intérêt nutritionnel pour le consommateur. Cependant, quel que soit l’alimentation, la race ou la saison, le lait de chèvre contiendrait donc 3 à 25 fois moins de vitamine B9 et 3 à 95 fois moins de B12 que le lait de vache (et seulement des traces de β-carotène).

Les perspectives de cette étude sont de comprendre les mécanismes à l’origine des concentrations extrêmement faibles en folates et en vitamine B12 dans le lait de chèvre, afin d’envisager des moyens de les accroitre. Il serait également intéressant de mieux connaitre les facteurs de variation agissant sur les concentrations des autres vitamines (D, K et autres B).

Ce travail a été conduit dans le cadre du 4e programme PSDR Grand Ouest au sein du projet Flèche (Fromages et Laits issus d’Elevages de Chèvres conduites avec de l’Herbe) 2015-2020, coordonné par Hugues Caillat (UE FERLUS).

RÉFÉRENCES
Laurent C., Caillat H., Girard C.L. et al. (2023). Impacts of production conditions on goat milk vitamin, carotenoid contents and colour indices. Animal, 17 (1), 10. http://dx.doi.org/10.1016/j.animal.2022.100683

[1] Vitamine A ou rétinol, E ou tocopherol, B2 ou riboflavine, B6 ou pyridoxal, pyridoxamine, B9 ou folates, B12 ou cobalamine.

Photo de couverture : Hugues Caillat (INRAE)